Mon mai 1968
J'ai vécu la période de mai 1968 à Marseille; j'étais en instruction dans un centre de l’Armée, près de la citadelle du Pharo, où se déroulait la formation pour partir en coopération civile, afin d'éviter la conscription en Algérie, destination terrible que je voulais éviter à tout prix, car il ne me disait rien de participer à ce qui me semblait une guerre coloniale tardive.
Il y a eu des manifestations organisées à Marseille, étudiants et syndicats se sont mobilisé et défilé pour être en phase avec les événements parisiens;
Nous étions logés dans un hôtel très proche la Légion étrangère; sous le soleil printanier, tous les événements qui mettaient la France à feu et à sang paraissaient dérisoires et lointains, au bord de la mer impavide et du port où les mâts de bateaux de plaisance se balançaient doucement sans violence;
N’étant pas trop mal classé à la fin de la formation, j'ai pu choisir de partir à Madagascar, où je suis resté comme coopérant civil pendant près de 18 mois.
Dans le groupe que nous formions, médecins et chirurgiens fraîchement nommés, (qui allaient être répartis en Afrique en Asie, et dans les autres territoires affiliés, dont Madagascar et la Réunion), pratiquement personne ne contestait l'autorité des médecins militaires qui nous formaient, dans un esprit d’utilité, de partage et de conseils précieux pour aider en milieu précaire; d’où un immense respect de notre part envers ces enseignants, qui en avaient vu de sanglants évènements et des situations inquiétantes…
Mais l'idée de l'imagination au pouvoir aller semer ses germes dans nos caboches formatées; ce n’est qu’au retour, que j'ai pu constater les changements profonds qui se manifestaient dans l'université et dans les hôpitaux de l'Assistance Publique;
Néanmoins tous les grands patrons n'avaient pas été déchus de leur poste, une forme de respect hiérarchique subsistait.
L'éclatement de l'université et de la faculté de médecine en plusieurs sous-ensembles a pris du temps, et a permis à de nouvelles individualités professionnelles d'émerger et de prendre une place dans une société que nous espérions plus juste, susceptible de récompenser davantage les mérites scientifiques et humains; mais cela est une autre histoire...